Fish Tank

Publié le par Qalawun

Trois jours à Paris. Des poissons dans un bocal. L'animal. Si j'avais su, j'aurai pas venu ? Question mark. Là, un plat préparé dégoûtant: poulet à l'ananas façon Sainsbury. Je rentre tard du travail. Dernier repas avec mon Israélien. Il quitte l'appartement demain. J'ai mal au ventre, mal au coeur, mal à la tête, mal au poumon gauche. Mon nodule calcifié. Calciné ? J'oublie ce que m'a dit la nurse du Charing Cross hospital. Cette conne a réussi à se tromper d'enveloppe contenant les résultats de ma radio. Vous allez bien! Manque de pot, j'avais l'enveloppe d'un autre. Je reviens. Ah, en fait, hem, vous avez un nodule calciné. Rien d'inquiétant. Les restes d'une tuberculose que vous auriez éliminée. Ou ceux de longues années passées à fumer. Voila des années que je crache mes poumons quand je jouis:

 

- Thanatos, enchanté!

- I'm Eros, please to meet you!

Je ne me suis jamais demandé si c'était effrayant.

 

Je me suis convaincu qu'il faut aller au devant des problèmes. Refuser les faux-semblants. Il y a une semaine, je larguais mon mec. Ne m'y attachait qu'une fine amarre lentement pourrissant. Malgré toute la tendresse que j'ai pour lui. Je lui raconte mes envies d'air. De l'Air putain, j'étouffe! J'ai fini confiné dans une chambre parisienne à jauger mes douleurs. Ai-je mal? Oh oui.

 

Toi le Saint, si tu me lis, ceci est pour toi. Waterlilly killer. J'arrivais plein d'espoir d'être réconforté. Pas l'envie d'aller voir papa. Celle de m'endormir dans ces bras que je connaissais si bien. Je suis naïf et égoïste. Vice-versa. J'aurais voulu t'affronter seul à seul plus longtemps. J'aurais voulu ne pas écouter tes histoires. J'aurais voulu trouver la force de te dire les choses sans avoir à boire, à boire et à boire, encore. J'aurais voulu ne pas avoir besoin de venir. J'en avais terriblement besoin. Tu m'as embrassé au bout de trois jours, parce que je te l'ai demandé. Mon plus beau baiser depuis notre dernière rencontre. Le seul que ma mémoire de poisson se rappelle avoir vraiment donné récemment. Baiser qu'il a fallu que tu tues quelques instants plus tard, devant la machine à tickets du métro Oberkampf. Je ne ramasse sans aucun doute que ce que j'ai moi-même semé: deux ans de frustrations. Ta frustration, les miennes. Deux ans qu'il m'a fallu pour me départir d'un poids que tout le monde savait trop lourd. Deux ans pour mûrir et cesser d'être un gamin. Cette orchidée qui a fleuri le jour de ma rupture, après une longue année de soins attentifs, était une belle métaphore. J'aimerais être plus fort aujourd'hui.

 

Je ne me souviens plus de ce que tu m'as dit et j'aimerais que tu me le répètes encore et encore. Que ce qu'il y avait entre nous n'est plus, que le garçon que tu as rencontré est formidable, que Bastille est à 15 minutes à pied. Que tu me martèles la tête de ces mauvaises fortunes. J'aimerais tomber amoureux d'un homme courageux. Voila des nuits que je ne dors plus. Contre un homme que je n'aime plus, puis contre un homme qui ne m'aime pas. Qu'y a-t-il de pire que pire? Pour me consoler je me dis que nous n'avons rien en commun. Ou si peu.

 

Je me répète. Je me répète. Je me répète. Combien de fois t'ai-je déjà raconté ça à toi qui ne parle pas? Ou peut-être est-ce que je n'ai pas su t'écouter? C'est pourtant sur tes épaules que je suis monté pour achever mon couple. Sur ce point-là je suis heureux; je suis plus libre aujourd'hui que je ne l'ai jamais été. Je n'ai pas de haine, peut-être une grande amertume, celle du perdant. Je ne suis pas quelqu'un de hargneux. J'aime te savoir là, pas loin. J'ai même - tellement - aimé traverser ce pont vers la BNF, acheter un bocal chez le Chinois et regarder les chats sur les bords de la Seine.

 

J'aime écrire, un peu, je mets mes idées au clair, tu n'y apprendras rien, je t'ai déjà tout dit, le Saint. Tires-en les conclusions que tu souhaites.

 

Londres, 24 janvier. Bientôt le 25. Bientôt la mort de ce janvier de merde. En février, je ferai ce qui me plait.

 

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Publié dans Jour après jour

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Q
<br /> <br /> Je suis a un stade ou j'ai un peu rien a foutre de la raison...<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> :=)<br /> <br /> <br /> <br />
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L
<br /> <br /> joli texte. comme un roman à clef...<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> la passerelle fut délicieuse, se rendre compte qu'elle ne mène nulle part raisonnable.<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> bisous<br /> <br /> <br /> <br />
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S
<br /> <br /> Le meilleur est toujours à venir (mais rarement en janvier).<br /> <br /> <br /> <br />
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