Et face au rez-de-jardin, le canapé

Publié le par Qalawun

C'est comme réaliser qu'un jour on peut mourir. Un nuage qui se perce et c'est la chute. Nous étions assis près d'un de ces tapis roulants qui vous servent des sushis. Plats roses, mauves et verts. Une soupe miso ? Assis là, la table en formica, les baguettes à séparer, le bec verseur d'eau gazeuse - ou plate. Comme on peut détester ces restaurants standardisés. C'est là qu'il le prononce, l'horrible mot, en deux syllabes empoisonnées.

 

En-nui. Ennui.

 

Mon estomac se retourne, la nouille s'arrête, je casse ma baguette. Ou presque. Le bonheur tranquille, l'assoupissement du couple, l'hydre tapie dans le creux du canapé, sous le coussin où nos têtes se posent pour regarder les longues heures jouées par l'iPlayer. Aux Armes citoyens! Sauvons la ménagère! Notre vie sociale réduite à sa portion congrue. Le couple porte sa propre mort. Moi qui n'ai que trente ans, déjà vieux. Mes discours millénaristes, mon angoisse blanche des pôles qui fondent, moi qui vis à mon bureau et qui y perd sans doute ma vie, petit à petit. Battons-nous, survivons à l'ennui. Je dois réfléchir. Moi qui pensais être à tout suffisant, mon sourire, mon long nez et mes bras, protégeant mon bonheur face à mon rez-de-jardin. Blousé. La mort douce du canapé. 

 

Dimanche. Ca va mieux. Loin les angoisses du suchi, des heures seul et de l'hydre ennuyée. Grand mât de hune sur rez-de-jardin. La vigie veille. Je t'aime.

Publié dans Jour après jour

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S
<br /> Salut R. Enfin de retour, ton silence devenait presque inquiétant. Ta plume est toujours aussi agréable à lire, j'espère que tu nous gratifiera plus souvent que ces derniers temps de tranches de<br /> ta vie.<br />
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X
<br /> enfin, te revoila, que de temps ecoulé depuis ton dernier post<br /> <br /> <br /> de trop longs mois d'absence sans explications, etais tu parti de Londres ? , et l'israelien definitivement quiité ou retrouvé ?  un de tes lecteurs depuis si longtemps  ,<br /> seduit par ton ecriture, ta culture et cette fenetre sur l'orient proche que tu savais si bien decrire<br /> <br /> <br /> je t'embrasse, moi qui pourtant ne te verrai jamais<br />
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Z
<br /> Enfin vous voilà de retour !<br /> <br /> <br /> L'amour donne d'écrire, surtout les fins d'amour ...  Les débuts on les vit, les fins on les écrit.<br />
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A
<br /> content de te relire, même si tu traverses un moment difficile. courage pour les jours qui viennent, ne perds pas trop de temps sur ton boulot (qui te passionne je pense), mais qui parfois nous<br /> fait passer à côté de la vie...<br />
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