Shah Abbas, The Remaking of Iran, au British Museum

Publié le par Qalawun

Je pourrais écrire un billet sur l'exposition Shah Abbas, The Remaking of Iran, au British Museum qui a lieu du 19 février au 14 juin 2009 mais je n'en ai pas vraiment envie. L'exposition est bien ficelée mais pas particulièrement riche. J'avoue avoir été plus impressionné par l'immense rotonde sous coupole au centre du British que par les pièces présentées dans l'exposition. Qu'on ne s'y trompe pas, il y a de très belles choses. Mais le parti pris pédagogique a primé sur le magnifique qui caractérise pourtant l'époque safavide. L'exposition n'est pas si longue, elle se parcourt en deux heures en s'arrêtant bien devant chaque objet. Les principales salles sont consacrées aux grands centres de pélerinages d'Iran, Ardebil, Mashhad et Qom et à l'enrichissement et l'embellissement desquels Shah Abbas a très largement contribué. Une exposition qui explique le rôle du souverain dans la création du style safavide, d'un art impérial, d'un goût, pas forcément novateur mais synthétisant un bon nombre d'éléments antérieurs et étrangers. Il y a quelques très bonnes feuilles, calligraphies et miniatures. Mais rien de bluffant.



Mon oeuvre préférée est peut-être l'ultra célèbre miniature du Louvre montrant Shah Abbas, vers la cinquantaine, assis contre un tronc d'arbre, étreignant tendrement un jeune dandy imberbe et plutôt efféminé (c'est le canon à l'époque) à la cuisse presque découverte. La main droite du shah retient celle de l'échanson qui lui offre un coupe de vin. La gauche tombe sur l'épaule du jeune homme qui d'une main ferme attrape une bouteille bulbeuse à long col coincée entre ses cuisses. La bouteille  ithyphallique ne laisse aucun doute sur le caractère de la scène à laquelle nous assistons. C'est une scène de drague près d'un fourré. Rien de plus commun. Juste avant un coup de rein. Le shah et le jeune homme se regardent droit dans les yeux, le shah sérieux, les moustaches cachant sa bouche, et le jeune au sourire entendu. A l'arrière plan dans un paysage de bosquet avare de détails, une autre bouteille de verre est posée entre deux bols de métal, pleine d'un vin rougeoyant, la bouteille turgescente presque, encapuchonnée au col d'un morceau de tissu ligaturé, qui livre la clé de la scène s'il en était besoin. Une invitation à la déboucher et à laisser couler ce flot qui n'attend qu'à être répandu.



Portrait de Shah Abbas et son page, signé Muhammad Qâsim
1036 AH / 1627 AD, Iran, Isfahan
,
Dessin à l'encre, rehauts de couleurs et or sur papier
Paris, Musée du Louvre


Un poème est inscrit dans la partie supérieure : "Que la vie te procure ce que tu désires de trois lèvres : celle de l'amant, celle de la rivière et celle de la coupe.''

Publié dans Art

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P
J'adore ton commentaire! Passer de la bouteille "ithyphalique" à "c'est une scène de drague près d'un fourré avant un coup de reins", c'est somptueux!
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